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Pierre-Edouard Grego

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Ken Russell en 5 films

  • Photo du rédacteur: Pierre-Edouard Grego
    Pierre-Edouard Grego
  • 24 janv. 2023
  • 5 min de lecture

C’est drôle, car quand je parle de cinéma à mes proches, ces derniers en viennent souvent aux mêmes conclusions, précurseurs d’une Histoire du cinéma en création. Ainsi, quand je parle de Godard, je vois souvent les mêmes réactions de rejet. Quand j’aborde Chaplin, tous sont unanimes : c’est un grand, un génie. Quand j’aborde Bergman, c’est un cinéma qui n’intéresse pas - c’est un cinéma d’intellectuel.


Et il y a un réalisateur dont l'œuvre n’inspire rien du tout. Le temps a fait son passage et l’a emporté dans l’oubli : c’est Ken Russell.


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Si on devait l'étiqueter, on pourrait facilement dire que le cinéma de Ken Russell est celui de la démesure. C’est un expérimentateur à la filmographie à son image : disparate, inégale, et fascinante. On lui donne aussi souvent l’image d’un cinéma à regarder “sous influence”, d’un univers tellement dingue, que visiblement, il ne pourrait être compréhensible autrement.


Soyons clair, l'œuvre de Ken Russell n’est pas un cinéma pour tous. Comme tout expérimentateur, c’est un réalisateur qui, comme Godard, est parfois allé trop loin. Mais c’est aussi quelqu’un qui en cinquante ans de carrière a exploré l’histoire du cinéma et de la musique. Je ne vois que très peu de cinéastes qui ont autant essayé de se renouveler au fil des décennies. Ken Russell a commencé avec les grands studios américains avant de s’en détourner : il a tourné des films musicaux, des documentaires, des drames, de la science-fiction, de l’horreur…


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Si aujourd’hui certains aficionados se rappellent du nom de Ken Russell, c’est parce qu’il est le réalisateur de l’adaptation de Tommy, l’Opéra-rock des Who. Ce film regroupe Eric Clapton (en prêtre ci-dessus - Clapton is God, forcément), Tina Turner, Elton John ou encore Ann-Margret, Oliver Reed et Jack Nicholson. Bref, un casting, comme son réalisateur, démesuré.


Loin de moi l’idée de vous forcer à aimer ce cinéaste. Si l’Histoire ne retiendra pas son nom, c’est aussi parce qu'a contrario de Kubrick, tout n’est pas réussi dans sa filmographie, et certains de ses films, même les meilleurs, possèdent des faiblesses.

Ces défauts ne l’empêchent pas d’être un incroyable cinéaste, novateur à bien des égards, avec des plans d’une créativité qui laisse encore rêveur aujourd’hui.

C’est aussi parce que sa filmographie est disparate que je vous dresse une liste de cinq de ses films, non exhaustive, rangés dans l’ordre chronologique afin que vous puissiez piocher dans ce qui vous plaît.


Love (Women in Love) (1969)

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Nommé à l’Oscar du meilleur réalisateur, du meilleur scénario et de la meilleure photographie. Récompensé pour celui de la meilleure actrice. Golden Globe du meilleur film étranger. Rien que ça. Love est le film qui a révélé Ken Russell au grand public.

C’est l’adaptation d’une nouvelle des années 1920 qui a fait scandale à l’époque. L’histoire de deux sœurs libres et indépendantes qui s’assument dans une société qui est loin d’être émancipée. Deux hommes de la bourgeoisie vont s’amouracher de ces deux femmes… avant d’être en pleine confusion sentimentale…

Ce film, malgré quelques longueurs, est extrêmement touchant. Cette confusion des genres, des sexes résume assez bien la liberté sexuelle qui était de mise à cette époque.


The Boy Friend (1972)

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Polly Brown est une assistante - bonne à tout faire - d’un music-hall. Alors que la vedette se blesse juste avant la représentation, elle doit la remplacer…


Si on prend la MGM et qu’on parle de comédie musicale, certains fans penseront instantanément à Chantons sous la Pluie, Le Magicien d’Oz ou encore Un jour à New York. Quand on prend une comédie musicale à succès jouée cinq ans à Broadway et que l’on y ajoute Twiggy, l’une des mannequins les plus connues des années soixante, on peut facilement imaginer un résultat conventionnel, façonné pour plaire au plus grand nombre.

Sauf que Ken Russell est un réalisateur qui ne va jamais là où on l'attend.

L'homme, qui n’a pas encore sa réputation “d'excentrique”, bouleverse les codes de la comédie musicale tout en les respectant. Nous avons d’un côté une histoire d’amour cliché, du chant, de la danse, mais Ken Russell va apporter sa touche de démesure qui transforme ce film en une sorte d’expérience jouissive.

Et finalement, n’est-ce pas là le principe même d’une comédie musicale ?


Tommy (1975)

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Véritable film culte à bien des égards, symbole d’une période désormais révolue, Ken Russell a enfin trouvé le terrain fertile qui va avec son cinéma avec cette adaptation de l’album des Who.

Tommy est un petit garçon qui n’a jamais connu son père. Ce dernier, certainement décédé pendant la guerre, est remplacé dans sa vie par le nouvel amant de sa mère, un homme un peu brutal qui n’est guère intéressé par l’éducation de cet enfant.

Les années passent et le père biologique refait surface dans la vie de Tommy. Voulant reprendre sa place auprès des siens, il est violemment tué par le beau-père de l’enfant.

Alors qu’on demande à l’enfant de ne rien répéter, ce dernier devient alors sourd, muet et aveugle…

C’est simple, si vous voulez comprendre le rock, la société de l’époque, ce film est une sorte de guide. Il peut paraître excentrique à bien des niveaux, mais il est la représentation parfaite du rêve et des désillusions des années soixante soixante-dix, où une partie de la contre-culture espérait de façon idyllique que la musique et le rock allaient ouvrir un monde de paix et de changements profonds de l’humanité.


Au-delà du réel (1980)

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Ce film ne m’a pas laissé une grande empreinte. Si je devais écrire cette liste totalement subjectivement et non pour vous faire découvrir ce réalisateur, je vous aurais invité à voir Mahler, Valentino ou Les Jours et les Nuits de China Blue (avec un incroyable Anthony Perkins !).

Si j’ai choisi ce film, c’est avant tout car il est une des influences majeure d'une série qui rencontre un grand succès : Stranger Things.

Ce qui est intéressant avec l’évolution de Ken Russell, c’est que plus il évolue dans son cinéma, plus il apprend à se connaître et à adapter son style à son cinéma, ce qui le rend forcément plus accessible.

Un chercheur revient avec un puissant psychotrope donné par les indiens du Mexique. Jamais étudié auparavant, il va alors prendre cette substance tout en s’enfermant dans un caisson pendant qu’un de ses amis analyse ses activités cérébrales.

Vous l’aurez compris, la science-fiction est encore un terrain de jeu formidable où Ken Russell peut exprimer son art.


La Putain (1990)

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Là encore, Ken Russell surprend… par sa sobriété. Ce film est également un de ses plus faibles budgets.

Ce film nous présente aucun artifice, et il se remarque même par son saisissant réalisme. Filmé presque comme un documentaire, il raconte le récit d’une jeune prostituée qui cherche à échapper à son proxénète.

Inspiré d’un fait réel, cette œuvre présente le cinéaste sous un autre angle, avec ses faiblesses, mais avec aussi d’énormes qualités.


Pour mieux comprendre l'œuvre de Ken Russell, je vous invite à visionner cet extrait totalement incroyable de Mahler, où le personnage titre décide de se convertir au christianisme afin de se faire accepter de l’antisémitisme de Cosima Wagner et être nommé responsable de l’Opéra de Vienne. (lien ici). Pour mieux comprendre l’esthétisme de Ken Russell, je vous conseille aussi cet extrait plus court de Valentino. (lien ici), ainsi qu’un autre de Tommy avec Elton John. (lien ici)



 
 
 

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